Dax : les thermes Bérot, une saga qui dure depuis cinquante ans

8 mai 2024
50 ans thermes bérot

Les thermes Bérot, établissement incontournable de la cité thermale, fêtent leur anniversaire ce mois d’avril 2024. Retour sur une saga familiale où il est question de rugby, de Solex, de chasse à la bécasse, mais aussi de Jean Nouvel

En ce mois d’avril 2024, Jean-Louis Bérot fait sa cure aux thermes du même nom. Il y a cinquante ans, un 1er avril, ouvrait l’établissement de la place Saint-Pierre, et le rugbyman, après avoir longuement hésité entre vivre à Toulouse ou Dax, avait pris sa décision : diplôme de kinésithérapeute en poche, il allait rentrer pour se lancer dans l’aventure thermale avec son cousin Roland.

Un demi-siècle plus tard, bien qu’officiellement à la retraite depuis 2011, il connaît chaque pierre de l’établissement, mais aussi chaque agent thermal qui s’y active. À 76 ans, il continue de noter sur un bout de papier des pistes d’amélioration. Il se souvient de l’arrivée de la famille place Saint-Pierre.

« Nous habitions au Sablar, comme Pierre ‘‘Bala’‘ (Albaldejo, NDLR), une petite maison impasse Lafitte. Mon père y était né au rez-de-chaussée, et moi au premier. Les VélosoleX sont apparus dans les rues de Dax, mon père avait un garage en bas du Vieux-Pont, et il y a eu un terrible incendie dans leurs locaux. Mon père a été blessé, il n’a pas pu marcher pendant un an. J’ai des souvenirs de l’inondation de 1952, du quartier noyé. Mes parents ont acheté les locaux de la place Saint-Pierre pour y relancer l’activité, et on est arrivé là en 1954, j’avais 7 ans. »

Le garage de la famille Bérot est arrivé place Saint-Pierre en 1954.
Le garage de la famille Bérot est arrivé place Saint-Pierre en 1954.Isabelle Louvier/SO

1 Du rugby au thermalisme

Dix ans plus tard, le jeune Jean-Louis quittait Dax pour la Ville rose : « J’ai été envoyé à Toulouse, je n’étais pas un très bon élève, mes parents au garage n’avaient pas trop le temps de me surveiller. Par contre, je jouais déjà au rugby ! »

Signature au Stade Toulousain, première sélection en équipe de France en 1968, Jean-Louis Bérot écrit quelques-unes des plus belles pages de l’histoire des Tricolores. Pourtant, ses attaches dacquoises ressurgissent bientôt : « En 1973, j’étais devenu kinésithérapeute, je voulais m’installer avec deux copains médecins à Toulouse. Mais il y avait le garage à Dax, et j’ai pris la décision de créer un établissement thermal. J’ai reçu plein d’offres de clubs de rugby quand j’ai quitté le Stade Toulousain. À la place, je suis rentré à Dax, je voulais revenir ici pour la chasse à la bécasse ! Ce n’était ni l’argent, ni le rugby ! »

La première façade des thermes Bérot, avec le garage de VélosoleX attenant.
La première façade des thermes Bérot, avec le garage de VélosoleX attenant.Illustration Thermes Bérot

C’est un ex-président du Stade Montois Basket, Jacques Dorgambide, qui a dessiné les plans des futurs thermes Bérot avec Jean-Louis. « J’ai emprunté jusqu’au dernier centime. Ce n’était pas simple, car c’était la mairie de Dax qui donnait l’autorisation pour l’ouverture d’un nouvel établissement. À l’époque, soit les thermes existants avaient des forages, soit ils étaient livrés par la Ville. »

Max Moras l’a accordé, mais pas son successeur. « Les autres établissements thermaux voyaient aussi ça d’un mauvais œil. Comme j’étais encore sélectionné, en 1974 contre l’Irlande, quatre jours avant le match, j’avais mis mon blazer du XV de France et je me suis rendu à la Direction générale de la santé, à Paris. Dans un tout petit bureau, j’ai rencontré une fonctionnaire à qui j’ai parlé de mon problème. Nous avons été le premier établissement en France à avoir une autorisation, le problème était réglé ! »

Foch, Borda, Écureuils : les autres thermes auront également plus tard leurs autorisations.

Jean-Louis Bérot retrouve ses souvenirs : « On a ouvert un 1er avril, et je me suis retrouvé bloqué dans l’ascenseur avec la première curiste ! J’ai dû sortir par une trappe au-dessus de la cabine ! »
Jean-Louis Bérot retrouve ses souvenirs : « On a ouvert un 1er avril, et je me suis retrouvé bloqué dans l’ascenseur avec la première curiste ! J’ai dû sortir par une trappe au-dessus de la cabine ! »Isabelle Louvier/SO

2 Défense du thermalisme

Les thermes Bérot ne se sont pas faits seuls : « Roland Bérot avait toutes les qualités que je n’avais pas. Il était informaticien, on a réussi à s’entendre et à faire tourner cette maison. Ma femme m’a aussi beaucoup aidé, elle s’est énormément investie. Avec Roland et mon père, on a monté le Thermotel, à une époque où les établissements thermaux n’avaient pas de logements intégrés. Dans les années 1990, j’ai aussi eu un projet de monter une thalasso à Hossegor, ça m’a beaucoup occupé, mais finalement, ça n’a pas pu se faire. La ville avait un terrain sur le front de mer, on avait une chaîne (d’hôtels, NDLR), Radisson, un forage avec une eau à 65° C… Mais il y avait trop d’opposants à un projet de cette envergure, et le médecin Raillard, un proche de Mitterrand, nous proposait finalement les terrains derrière le Centre européen de rééducation du sportif (Cers) de Capbreton. Ça ne s’est pas fait non plus, c’est comme ça. »

Toutes les stations thermales du département ont enregistré une hausse de fréquentation par rapport à 2022, selon Landes Attractivité. Un bilan néanmoins inférieur à celui dit « de référence » de 2019

L’Espace thermal en gestion, les Thermes des Arènes bientôt revendus, les projets signés « famille Bérot » se succèdent à Dax : « On a lancé Logeradax, un organe de gestion locative pour des appartements pour curistes. » Pendant ce temps, les thermes Bérot, de 1 200 curistes à l’ouverture, sont passés à 7 000 par an.

Jean-Louis Bérot prend des fonctions dans l’un des trois syndicats thermaux (SETL) qui existent à l’époque. « Il fallait défendre le thermalisme, et c’est toujours le cas aujourd’hui. En juin 2000, une réglementation a imposé le zéro bactérie, et ça a fait fermer Tercis, alors que l’établissement venait d’être refait à neuf. »

3 Tel père, telle fille

Virginie Bérot, la fille de Jean-Louis, a pris la suite de son père dans la gestion des affaires familiales : « J’ai rejoint l’entreprise en 2011, après des études de pharmacie. Une femme avec des enfants, ça a bousculé quelques préjugés ! Je suis venu leur filer un coup de main et j’ai fini par m’investir à mon tour dans les syndicats. J’ai enfilé le costume de mon père, avec ma vision ‘‘santé publique’’ chevillée au corps, le thermalisme médical, et avec l’idée d’y adjoindre de la médecine douce ou énergétique à faire découvrir aux curistes. J’ai apporté ma touche. »

Jean-Louis le fondateur, Virginie Bérot et Sébastien Carpentier pour la suite.
Jean-Louis le fondateur, Virginie Bérot et Sébastien Carpentier pour la suite.Isabelle Louvier/SO

Jean-Louis Bérot se souvient aussi de l’épisode Splendid, plus récent : « Henri Emmanuelli, qui était président du Conseil de surveillance de la Caisse des dépôts, a œuvré pour le gros morceau Splendid et le Jean-Nouvel (la résidence Les Thermes, NDRL). » Ce dernier n’avait plus de clients, et il avait été inondé en 2014.

« On achetait le Titanic. On a alors rencontré Sébastien Carpentier, directeur de l’usine pyrénéenne de la Société des eaux minérales d’Ogeu. Il avait des projets, donc pour le Jean-Nouvel, on avait notre homme. Je ne veux pas polémiquer : le Splendid, c’était 15 millions d’euros, avec 7,5 millions de subventions, et un locataire déjà trouvé, Vacances Bleues. Henri Emmanuelli ne comprenait pas qu’on n’ait pas fait toute l’affaire, mais la Caisse des dépôts n’était plus intéressée par le Jean-Nouvel, ils trouvaient ça périlleux. Nous n’avions pas d’expérience en hôtellerie, nous venions du thermalisme, donc notre choix s’est porté sur le Jean-Nouvel. » Dont acte.

4 Une histoire de famille

Sébastien Carpentier est arrivé dans l’aventure, mais aussi dans la famille : « La finalisation des travaux du Jean-Nouvel, c’est en mars 2016, avec une ouverture en 2017. Il y avait tout à refaire à cause de l’inondation, et pas un seul tuyau n’a été conservé. »

La marque Coeur-Thermal unissant les deux établissements a été lancée début 2020. Jean-Louis Bérot avait toujours souhaité que l’entreprise reste familiale, et l’opportunité s’est finalement présentée : « On avait été approchés avant le Covid par des sociétés qui s’intéressaient à notre entreprise. Je n’étais pas chaud pour vendre mon bébé à des fonds de pension.

Sébastien Carpentier est venu me voir à la palombière pour me dire qu’il était intéressé pour la suite, et aujourd’hui, c’est lui qui a la majorité. »

Le secteur thermal est réuni jusqu’au 28 janvier pour son traditionnel salon, au carrousel du Louvre à Paris. C’est la fin d’une saison de rémission post-Covid « décevante » et le lancement d’une autre, pleine de solutions.

Celui-ci confirme : « On est resté sur un schéma d’entreprise familiale. On voulait aussi que les entreprises du groupe gardent leur capacité à investir, parce que demain, les établissements devront se renouveler et s’adapter. L’écologie, la crise de l’énergie, le service dispensé au curiste sont devenues des notions fondamentales. »

Source Sud Ouest : https://www.sudouest.fr/landes/dax/dax-les-thermes-berot-une-saga-qui-dure-depuis-cinquante-ans-19370428.php

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